AVF, entre actions et pédagogie

Depuis 25 ans, l’Association Végétarienne de France (AVF) agit pour transformer le modèle de consommation actuel en direction d’un modèle plus végétal. Sensible aux questions de santé, d’éthique et d’écologie liées à ces pratiques alimentaires, la structure, longtemps ignorée semble désormais occuper une place de premier plan.

Les risques relatifs à la consommation excessive de produits carnés ont longtemps été méconnus de la population française. Au contraire, manger de la viande au quotidien était considéré comme un vecteur de bonne santé ; voire faisait partie d’un art de vivre typique. Cette pratique s’est installée de manière croissante, après la guerre avec la fin du rationnement et le développement des industries agroalimentaires.

Le modèle d’alors se transforme pour se tourner vers une exploitation massive des denrées animales brutes (viande) mais aussi des sous-produits issus d’animaux (lait, fromage, œufs…). Pour ce faire, les bestiaux sont confinés dans des espaces clos, entraînant une prolifération plus rapide des bactéries, des problèmes éthiques concernant le bien-être des animaux et une empreinte carbone déraisonnée.

D’ailleurs, les scandales alimentaires ne tardent pas à éclater. Nous pouvons évoquer la « vache folle » dans les années 90, le virus « H5N1 » courant 2000 ou plus récemment la contamination du lait aux salmonelles. Ce sont toutes ces raisons, agrégées à des dimensions politiques et philosophiques qui construisent l’acrotère de l’AVF au milieu des années 90. Depuis 2013, elle est présidée par Élodie Vieille Blanchard.

 « C’est très rare les gens qui, d’un seul coup, deviennent végétariens ou véganes »

Elodie Vieille-Blanchard

Passer d’un régime omnivore à une alimentation végétarienne est un processus qui requiert d’abord de la pédagogie. « On a toute une action en direction des cantines à l’échelle de la France, explique par exemple Élodie Vieille-Blanchard. Beaucoup de villes en France proposent déjà des menus végétariens une à deux fois par semaine. On a adressé un message aux maires de France, ainsi qu’aux écoles, collèges et lycées. On met à disposition une boîte à outils sur Internet avec des recettes, des informations, juridiques et nutritionnelles pour s’assurer que la loi est bien appliquée en faveur des menus végétariens ».

Aidée par les « foodistas » comme Mlle Prune ou le Temps des Citrons, l’association propose également des ateliers « 1.2.3 Veggie », partout en France. Inspirés de l’initiative belge Donderdag Veggieday, ils rencontrent un franc succès. En effet, autour des fourneaux, néophytes et veggies confirmés peuvent se retrouver afin de préparer des plats sans viande. Outre l’aspect pratique, c’est aussi un moyen « d’échanger et de créer du dialogue en changeant les habitudes alimentaires progressivement » rappelle Élodie Vieille Blanchard.

Ces actions concrètes sont répertoriées dans la publication trimestrielle d’Alternatives Végétariennes, éditée par l’AVF. Devenue Virage à l’aune de 2019, elle est documentée par des études et des iconographies. La revue propose une approche ludique et scientifique de sensibilisation à ces nouvelles questions sociétales grâce à de la vulgarisation scientifique étayée par les rapports établis par des ingénieurs de Solagro et Carbone 4.

L’action doit enfin s’exercer dans une acception politique. En vertu des risques sanitaires, écologiques et éthiques, la question du « sans viande » est désormais sur la table des négociations. Ces deux dernières années, la France a légiféré afin d’interdire des pratiques jugées contraires à l’éthique en termes de bien-être animal. Grâce à la loi Agriculture et Alimentation (EGalim), il sera désormais possible de désigner un responsable de la protection animale dans chaque abattoir avec le statut de lanceur d’alerte accordé à tout employé. Il y a une réelle prise de conscience de la part des institutions même si le chemin est encore long. En fait, « réduire sa consommation de viande permettra de réduire la part de l’élevage industriel » selon la présidente d’AVF.

En ce sens, AVF a rédigé un programme pour une transition dirigée vers une alimentation plus durable et responsable. En 16 points parmi lesquels « Réformer le cadre de la Politique Agricole Commune et le mettre en cohérence avec l’action européenne pour le climat », « Végétaliser les réceptions de l’UE » ou « Encourager les jeunes agriculteurs.trices à s’orienter dans la production de fruits, légumes et légumineuses », ils dressent un bilan de la situation actuelle tout en proposant un accompagnement vers un changement des pratiques.

En vue des Européennes de 2019, ce programme a été soumis à (presque) tous les partis politiques français. Si nombre d’entre eux ont adopté quelques parties du programme envisagé par l’association, seuls deux gros partis ont soutenu l’ensemble du programme : la France Insoumise (LFI) et Europe Écologie Les Verts (EELV) l’ont même invité pour leurs universités d’été pour donner des conférences et animer des ateliers avec le public.