Makoto Murase, à l’initiative du système de récupération d’eau de pluie à l’échelle d’une mégalopole mis en place par Tokyo, nous raconte l’origine de son idée, les obstacles rencontrés et les actions nécessaires selon lui pour développer ce type de projets.
« J’ai commencé ce projet pour que les eaux de pluie soient mieux utilisées. J’ai réalisé que notre existence dépendait de la pluie. Au cours du XXIème siècle, nous aurons de moins en moins d’eau « saine ». Les rivières, les étangs et les lacs sont pollués et non-potables, tout comme les eaux souterraines. L’eau de pluie est ainsi en passe de devenir l’eau la plus saine à utiliser.
Or, partout dans le monde, beaucoup de citadins pensent que la pluie est une nuisance, qu’elle est désagréable. C’est particulièrement vrai au Japon, mais c’est le cas presque partout ailleurs. C’est, à mon sens, le principal obstacle auquel on est confrontés. Il s’agit de changer cette façon de penser. La pluie c’est quelque chose de formidable. Le plus important est de se rendre compte que c’est la pluie qui nous fait vivre. Pour que le système se généralise, il faut beaucoup d’actions locales, d’initiatives citoyennes, de pédagogie. Il faut multiplier les groupes citoyens locaux et il faut que ces groupes soient associés à la politique de gestion des eaux par les responsables publics.
Ce travail de prise de conscience passe par l’implication. Par ailleurs, pour que ces pratiques se diffusent, il manque aussi un courage politique pour lancer des investissements forts. En effet, ce type de système nécessite un développement à grande échelle pour être réellement efficace. Les promoteurs de ces systèmes sont également confrontés à un autre obstacle : le cloisonnement de l’administration publique. Il faut bien comprendre qu’un tel projet ne concerne pas un service unique, qui peut travailler dans son coin, mais un ensemble de services, qui doivent coopérer : l’urbanisme, l’environnement, le génie civil, la gestion des eaux, etc.
À cet égard, les responsables politiques ont un rôle clé à jouer. Dans mon cas, c’est lorsque le Maire de mon arrondissement a lancé un programme de coopération entre tous les directeurs des départements concernés que la situation s’est débloquée. Il est indispensable d’avoir une action publique forte pour que chacun d’entre nous se rende compte que l’eau est une ressource rare qu’il faut économiser, et que ce type de solution simple, sans contrainte pour l’utilisateur, et économe, permettra d’améliorer considérablement notre vie et celle de nos enfants. Mon rêve, c’est que les habitants du monde entier utilisent localement cette « eau du ciel ». Parce que les bénéfices à petite échelle sont une bonne chose, mais pour avoir un réel impact sur la planète, il faudra généraliser ce fonctionnement. »